Que n’a-t-on dit sur les larmes du vin ! Vous savez, ces gouttes transparentes qui coulent avec lenteur le long des parois de votre verre, après une délicate agitation. Elles ont fait couler beaucoup d’encre, et multiples sont les mots pour les nommer : pleurs, arcades, jambes (et pas cuisse, non mais !), arceaux, arches, jambage…
Qui n’a pas entendu tel vigneron ou tel sommelier prendre un air grave et mystérieux pour en vanter les mérites ? Elles seraient selon certains, l’expression de l’âme du vin par le biais de la puissance des éthers oenanthiques…
Je conseillerais au lecteur préférant rester dans un voile et y déceler un signe du divin de na pas aller plus loin… car derrière les larmes, point de magie, mais de la science pardi !
Les larmes se formant sur le verre sont la conséquence d’un effet de capillarité sur la paroi du verre. Baptisé au XIXème siècle sous le nom d’effet Marangoni, le mouvement des larmes est le résultat d’une différence de tension superficielle, alimentée par l’évaporation de l’alcool emprisonné dans le vin (les fameux éthers oenanthiques). En bref, le vin « accroche moins » que l’eau.
En faisant tourner le vin dans son verre, le dégustateur provoque la création d’un bourrelet de liquide moins chargé en alcool (qui s’évapore) que le vin sur la paroi du verre. Il va se créer une force d’entraînement du vin de bas en haut. Au niveau du bourrelet, la gravité intervient et provoque la formation de gouttelette qui vont redescendre le long des parois du verre. La lenteur de formation des gouttelettes dépendra de la viscosité du vin, ce qui explique que les liquoreux possèdent des larmes bien plus lentes.
Faites l’expérience chez vous en comparant un whisky et un verre de vin blanc sec (un petit bourgogne aligoté par exemple). Les larmes seront plus abondantes dans le cas du spiritueux. Essayez ensuite de l’expérience suivante ; comparez les larmes de deux Jurançons, l’un sec, l’autre plus classique, donc moelleux. Le plus sucré des deux présentera des pleurs plus épais et langoureux.